Management RH
16 décembre 2025

Transparence salariale : et si le vrai sujet n’était pas le salaire ?

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En juin 2026, la transparence salariale deviendra une obligation européenne. Les entreprises de plus de 100 salariés devront publier leurs écarts de rémunération, informer les candidats dès le processus de recrutement et justifier toute différence supérieure à 5 % entre femmes et hommes. Pour de nombreux dirigeants et DRH, c’est un séisme annoncé. Leurs craintes : tensions internes, nécessité de revoir les grilles, nivellement des discussions salariales, surcharge de travail administratif…

La perspective d’une mise à nu des politiques de rémunération inquiète, et l’on comprend pourquoi : la culture française du salaire reste marquée par l’implicite, la négociation individuelle et un certain tabou autour de l’argent.

Pourtant, ce débat révèle quelque chose de plus profond. Si la transparence salariale fait trembler les organisations, c’est parce qu’elle vient percuter une zone restée longtemps sous tension : la valeur du travail et sa reconnaissance. En ce sens, nous considérons que la réforme ne crée pas un problème mais éclaire un dysfonctionnement structurel. Et c’est précisément pour cela que nous y sommes favorables.

Lever le tabou permet enfin d’aborder les vrais sujets

Pendant des années, l’opacité salariale a été vue comme un garde-fou. Elle aurait permis d’éviter les comparaisons trop rapides, de préserver la paix sociale, de garder une marge managériale. Dans la réalité, elle a surtout généré incompréhensions, frustrations accumulées, rumeurs internes et sentiment d’arbitraire. Le manque de transparence n’a jamais protégé durablement une organisation !

La transparence salariale telle qu’elle se dessine en 2026 porte une ambition nouvelle : créer un socle de confiance minimal qui rende possible un débat beaucoup plus essentiel, celui de la contribution réelle, du développement professionnel, et de la valeur créée par chacun au sein d’un collectif. Le salaire, en réalité, ne devrait plus être le sujet central, mais un élément d’un contrat plus large, un marqueur parmi d’autres d’un échange équilibré entre l’entreprise et ses talents.

Le salaire n’est pas une dépense mais un investissement

On l’oublie trop souvent, l’entreprise n’achète pas la présence d’un talent, mais investit dans sa contribution à la performance globale. Ainsi, le salaire n’est pas seulement le reflet d’un marché, d’un niveau d’expérience ou d’un pouvoir de négociation… mais un choix d’investissement de l’organisation dans un talent et une capacité à créer de la valeur. Or, tant que le salaire demeure tabou, cet investissement est peu contextualisé ou compris. Résultat, une perte de sens pour les collaborateurs et des arbitrages parfois incohérents pour les entreprises.

Nous défendons un principe simple : ce qu’apporte un salarié dans une entreprise ne s’inscrit pas dans une logique comptable ou individualiste, mais dans une démarche systémique qui intègre le fonctionnement des équipes, la fluidité des process, l’apport au collectif, la qualité du management ou encore la dynamique d’engagement. À partir du moment où le salaire est clarifié, assumé et inscrit dans cette logique, il perd son caractère anxiogène et reprend sa place d’élément du capital humain.

Rendre lisible la valeur créée par les talents

Ce que change réellement la transparence salariale, ce n’est pas l’accès à des chiffres. Les salariés sont déjà bien informés, comparent, discutent… Ce que la réforme remet en lumière, c’est la relation employeur-employé. L’employeur a le devoir de proposer au salarié un travail de qualité créateur de valeur au sein de l’équipe, et de le rémunérer en regard de cette valeur. La directive n’a pas vocation à niveler les rémunérations, mais à objectiver les critères de rémunération en répondant à la question : qu’est-ce qui crée réellement de la valeur dans l’organisation ?

Nous avons nos pistes de réponses : alignement entre compétences et missions, capacité à tenir un rôle dans un certain contexte, contribution au collectif, impact sur la performance globale… Là encore, il ne s’agit pas de réduire la valeur au chiffre mais de la rendre visible, compréhensible, partageable. Ce mouvement est déjà engagé dans la plupart des entreprises qui souhaitent stabiliser leurs équipes et renforcer leur attractivité. La transparence salariale y fera office d’accélérateur.

De la transparence à l’alliance valeur–sens

Une fois le salaire clarifié, le débat peut prendre de la hauteur et aborder les vrais sujets : développement des compétences, évolution professionnelle, place de chacun dans le collectif, cohérence entre ce que l’on donne et ce que l’on reçoit, ou encore la motivation que l’on trouve à contribuer. Le rôle de l’entreprise se clarifie : offrir aux talents un emploi où ils créent de la valeur pour l’organisation et trouvent du sens pour eux-mêmes.

L’obligation de transparence devient l’opportunité pour les organisations d’aligner discours et pratiques, d’expliciter leurs choix, d’assumer leurs arbitrages. Côté collaborateurs, elle assure un cadre plus lisible, plus juste, plus cohérent, condition de l’engagement durable. Loin de représenter une menace, la transparence salariale peut devenir un levier de transformation profonde de la relation employeur–collaborateur. 2026 peut alors marquer bien plus qu’une obligation légale : le début d’un nouveau pacte professionnel fondé sur la valeur, le sens et la confiance.

Gaëlle Monteiller et Olivier Petit
Co-fondateurs de TOD

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